altDes recherches menées par Olivier Delelis (ENS Paris-Saclay, CNRS UMR8113), Isabelle Malet (Sorbonne Université, UPMC, Inserm UMR1136) et leurs collègues ont démontré qu’un virus muté du VIH était capable de se répliquer sans intégrer son ADN dans les chromosomes de la cellule immunitaire qu’il a infectée. Ce phénomène permet au virus de contourner l’effet des inhibiteurs d’intégrase administrés aux patients afin de contrôler la réplication virale. Ces résultats, issus de recherches financées par l’ANRS, font l’objet d’une présentation le 6 mars 2018 lors de la Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections (CROI 2018) qui se tient du 4 au 7 mars à Boston.

L’intégration du génome du VIH dans les chromosomes de la cellule hôte est considérée jusqu’à présent comme une étape strictement indispensable à la réplication du VIH : c’est, avec celui de la rétro-transcription, un des dogmes centraux de la rétrovirologie.

Dans cette étude, des chercheurs soutenus par l’ANRS, ont sélectionné dans des conditions particulières, in vitro, un virus résistant au Dolutégravir. Il est à noter que des mutations similaires ont été observées chez un patient échappant au traitement mettant en jeu le Dolutégravir.
Le Dolutégravir est une molécule de la famille des inhibiteurs d’intégrase qui est utilisé dans les traitements antirétroviraux. Il empêche la réplication du virus en ciblant l’intégrase : enzyme permettant au virus d’intégrer son ADN dans celui de la cellule infectée. Le virus utilisé dans cette étude ne présentait pas de mutation du gène codant l’intégrase, ce qui est habituellement le cas chez les virus résistant au Dolutégravir, mais une série de mutations situées dans l’extrémité 3’ de son génome.

Dans leurs analyses, les chercheurs ont observé que ce virus mutant avait la capacité de se répliquer de manière importante en présence ou non d’inhibiteur d’intégrase. Cependant, en présence d’inhibiteur d’intégrase, l’ADN viral n’était pas intégré à l’ADN de la cellule hôte. Ils ont également observé dans ce cas, la présence d’une forte accumulation d’ADN viral circulaire. C’est à partir de cet ADN viral circularisé que ce VIH muté peut se répliquer sans être obligé de passer par l’étape d’intégration.

Ainsi, ce virus présentant une mutation à son extrémité 3’ est capable de se répliquer sans intégrer son génome au sein de celui de la cellule qu’il infecte et ce, afin d’échapper au Dolutégravir. Ce virus est aussi résistant au Raltégravir et à l’Elvitégravir, deux autres anti-intégrase.
C’est la première fois qu’un tel mécanisme de résistance aux inhibiteurs d’intégrase est décrit, mettant en évidence la possibilité pour un rétrovirus de se répliquer sans passer par une étape d’intégration dans les chromosomes cellulaires.

Sources:
UNINTEGRATED VIRAL DNA INVOLVED IN DOLUTEGRAVIR RESISTANCE
Isabelle Malet1, Frédéric Subra2, Clémence Richetta2, Hervé Leh2, Vincent Parissi3, Charlotte Charpentier4, Gilles Collin4, Diane Descamps4, Eric Deprez2, Vincent Calvez1, Anne-Geneviève Marcelin1, Olivier Delelis2
1Sorbonne Université, UPMC INSERM, UMR 1136), 75013 Paris, France Hôpital Pitié-Salpêtrière, Department of Virology, Paris, France. 2LBPA, ENS Cachan, CNRS UMR8113, IDA FR3242, Université Paris-Saclay, F-94235 Cachan, France. 3Fundamental Microbiology and Pathogenicity Laboratory, UMR5234 CNRS-Bordeaux University, 33146 Bordeaux, France. 4INSERM, IAME, UMR 1137, F-75018 Paris, France; Université Paris Diderot, IAME, UMR 1137, Sorbonne Paris Cité, F-75018 Paris, France; AP-HP, Hôpital Bichat, Laboratoire de Virologie, F-75018 Paris, France