altL’ANSM a réuni le 17 octobre 2017 les promoteurs académiques et industriels d’essais cliniques et les comités de protection des personnes (CPP) pour faire le point sur la phase pilote préparant la mise en application du règlement européen sur les essais cliniques de médicaments, en présence de la Direction générale de la Santé et d’un représentant de l’Agence européenne des médicaments. Démarrée il y a deux ans, cette phase expérimentale constitue un enjeu important en termes d’accès aux médicaments innovants pour les patients et d’attractivité de la France au sein de la recherche clinique européenne.

Le règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments publié au Journal officiel de l’Union européenne le 27/05/2014 prévoit notamment :

  • la mise en place d’une évaluation rapide, centralisée et coordonnée des demandes d’autorisation d’essais cliniques ainsi que de leurs modifications, dès lors que l’essai est conduit dans au moins un Etat membre de l’Union européenne. Ce règlement instaure un dépôt unique du dossier de demande d’autorisation par le promoteur de l’essai clinique sur un portail européen qui regroupera toutes les informations et données relatives à cet essai et qui sera, pour partie, accessible au public ;
  • un examen scientifique et éthique en 2 parties d’évaluation dans un délai fixé : partie I : une évaluation coordonnée entre Etats membres concernés aboutissant à une conclusion unique ;
  • partie II : une évaluation par chaque Etat membre concerné conduisant à une conclusion nationale ;
  • le principe d’une autorisation tacite.

L’entrée en application de ce règlement est dépendante de la mise à disposition du portail européen unique sur lequel les promoteurs pourront déposer leurs dossiers d’essais clinique. Ce portail européen devrait être mis en service courant 2019 a précisé Noémie Manent (EMA) qui en a présenté les principales fonctionnalités techniques.

Bilan à deux ans de la phase pilote

Depuis septembre 2015, l’ANSM mobilise les promoteurs académiques et industriels d’essais cliniques et les Comités de protection des personnes (CPP) afin de préparer la mise en application[1] de ce règlement européen.
La France a été le premier pays d’Europe à mettre en place une procédure expérimentale (phase pilote) qui a fonctionné, dans un premier temps, avec 21 CPP volontaires.

A la suite de l’entrée en vigueur de la loi Jardé[2] , les 39 CPP français ont été intégrés. Les dossiers soumis leurs sont attribués par tirage au sort organisé par le ministère de la santé. Jean-Yves Lacoste (DGS) a présenté le système d’information[4] (SI) qui doit permettre, au niveau national, les échanges entre les promoteurs et les CPP ainsi qu’entre les CPP et l’ANSM. Ce SI national devrait être opérationnel début 2018, les promoteurs pourront alors déposer leurs dossiers sur la plateforme .

Le bilan à deux ans de la phase pilote, présenté lors de la réunion, confirme les avancées identifiées lors des précédents bilans semestriels, en particulier l’adhésion et les échanges constructifs entre les parties prenantes, l’augmentation du nombre de dossiers déposés dans le cadre de la phase pilote et l’intégration de la nouvelle organisation liée à l’entrée en vigueur de la loi Jardé.

Au 28 septembre 2017, 260 dossiers ont été déposés dans le cadre de la phase pilote et 210 ont été gérés dans ce cadre, ce qui représente 14,2 % des dossiers déposés à l’ANSM. Les 50 dossiers «non gérés» étaient soit non recevables, soit n’ont pas pu être gérés dans les délais par le CPP désigné. Près de la moitié des dossiers gérés ont concerné des médicaments en oncologie et hématologie. 33 promoteurs académiques différents (concernant 97 dossiers déposés) et 40 promoteurs industriels différents (concernant 113 dossiers déposés) ont participé à la phase pilote.

Sur les 193 demandes clôturées au 28 septembre 2017, 127 ont abouti à une autorisation de l’ANSM et un avis favorable du CPP concerné avec un délai moyen d’instruction de 68,9 jours.
Le bilan quantitatif à deux ans présenté lors de la réunion est consultable ici .

Bilan quantitatif du 28/09/15 au 28/09/17

  • Nombre de dossiers déposés dans le cadre de la Phase pilote : 260
  • Nombre de dossiers gérés dans le cadre de la Phase pilote : 210 (soit 14,2 % des dossiers déposés à l’ANSM)

1e phase expérimentale
14 mois
2e phase expérimentale
10 mois (application loi Jardé)
Total
période 14 mois 10 mois 24 mois
Nbre dossiers déposés 148 112 260
Nbre dossiers gérés 123 87 210

8,8 par mois 8,7 par mois

→ 210 dossiers soumis au 28 septembre 2017
Dossiers soumis Type de promoteurs Type d’essais Etudes impliquant des centres de recherches
académiques industriels Phase 1 Phase 2 Phase 3 Phase 4 NP* nationaux internationaux

6  mois

(51 dossiers)

18 33 15 13 17 6 0 19 32

12 mois

(112 dossiers)

50 62 24 28 53 7 0 52 60

18 mois

(152 dossiers)

66 86 31 42 68 10 1 67 85

24 mois

(201 dossiers)

97 113 40 56 98 14 2 96 114

→193 demandes d’AEC clôturées au 28 septembre 2017
Dossiers clos Type de promoteurs Type d’essais Etudes impliquant des centres de recherches
académiques industriels Phase 1 Phase 2 Phase 3 Phase 4 NP* nationaux internationaux

6 mois

(26 dossiers)

11 15 8 7 7 4 0 12 14

12 mois

(89 dossiers)

39 50 18 22 42 7 0 39 50

18 mois

(128 dossiers)

56 72 24 35 60 8 1 58 70

24 mois

(193 dossiers)

88 105 34 54 89 14 2 88 105

La réunion d’échanges et d’information organisée par l’ANSM a permis de faire un point avec toutes les parties prenantes deux ans après le lancement de la phase pilote, de souligner les avancées mais également d’identifier les difficultés et les mesures à prendre pour être prêts au moment de l’entrée en application du règlement européen.

La table ronde consacrée au retour d’expérience des parties prenantes a mis en évidence des difficultés persistantes sur les essais cliniques en général, la volonté commune d’y remédier et dégagé des actions susceptibles d’améliorer le fonctionnement. Pierre-Henri Bertoye (président de la CNRIPH4) a expliqué en quoi le travail de la CNRIPH, placée auprès de la Ministre, allait contribuer à harmoniser le fonctionnement et les modalités de travail des CPP. Les délais, qui ont été impactés négativement par l’introduction d’un tirage au sort entre tous les CPP, devraient être améliorés à travers plusieurs leviers d’action : groupes de travail mis en place par la CNRIPH, outils informatiques qui vont permettre d’améliorer le suivi de l’évolution des dossiers.

De son côté, l’ANSM a mis en place un plan d’actions pour réduire les délais tout en assurant en priorité la sécurité des participants des essais, ainsi que l’évolution de l’organisation avec la mise en place d’une cellule dédiée aux essais précoces.

Objectif : 50 % des dossiers dans la phase pilote d’ici fin 2018

La phase pilote est apparue, pour l’ensemble des parties prenantes, comme un outil privilégié pour agir sur les délais d’autorisation des essais cliniques. Néanmoins, le pourcentage de dossiers actuellement déposé dans ce cadre (14,2 %) est insuffisant pour permettre à la France d’entrer pleinement dans la réglementation européenne dans deux ans. L’objectif de 50 % des dossiers déposés dans le cadre de la phase pilote d’ici fin 2018 proposé par l’ANSM a été partagé collectivement. Un objectif «atteignable» selon les CPP, un objectif «que l’on ne peut qu’encourager» pour les promoteurs industriels qui rappellent qu’il n’y a aucun risque à entrer dans cette phase, mais seulement des améliorations à en attendre. Pour leur part, les promoteurs académiques se déclarent "convaincus de l’utilité de la phase pilote pour se préparer aux échéances européennes".

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[2] L’entrée en application, initialement prévue en mai 2016, ne sera effective qu’avec la mise à disposition du portail européen unique.
[3] loi n° 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine, telle que modifiée par l’ordonnance n° 2016-800 du 16 juin 2016 et de son décret d'application n° 2016-1537 du 16/11/ 2016 relatif aux recherches impliquant la personne humaine (J.O 17/11/2016)
[4] L’article D. 1123-34 du code de la santé publique prévoit que le secrétariat de la Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine (CNRIPH) met en œuvre un système d’information disposant d’un espace de stockage sécurisé »