12 avril 2018, 11h00 - Marseille, France


Une nouvelle étude dirigée les Professeurs Yehezkel Ben-Ari et Constance Hammond (Neurochlore et B&A Therapeutics, Marseille, France) démontre que la bumétanide, un antagoniste de NKCC1 (récepteur membranaire qui importe les ions chlore à l'intérieur des neurones) normalise l'activité des neurones du striatum et améliore les problèmes moteurs de souris modèles de la maladie de Parkinson. Ces observations confortent les résultats d'une étude clinique pilote menée dans le cadre d'une collaboration avec le Professeur Philippe Damier (CHU Nantes, France) et ouvrent la voie à une étude clinique de phase 2 dans cette indication. Ce travail est publié dans le journal Nature Communications en date du 12 avril, 2018.


La maladie de Parkinson (MP) est une maladie dégénérative du système nerveux central qui induit progressivement une série de troubles moteurs : akinésie (anomalies dans l'initiation et l'exécution du mouvement), tremblements, hypertonie musculaire (rigidité) et souvent, une démarche dite parkinsonienne qui se caractérise par un dos voûté, peu ou pas de balancement des bras et des épisodes de « freezing » (immobilité soudaine et brève habituellement accompagnée d'un piétinement). La grande majorité des patients sont atteints de formes sporadiques de la maladie, les causes en restant inconnues. La maladie de Parkinson est due à une dégénérescence des neurones qui synthétisent et libèrent la dopamine avec comme conséquence une déplétion de ce neurotransmetteur en particulier dans le striatum, une structure impliquée dans la motricité. Les médicaments disponibles visent tous à restaurer les effets de la dopamine (en augmentant la quantité de dopamine dans le cerveau ou en agissant directement sur les récepteurs de ce messager chimique). La plupart du temps efficaces, ces traitements sont néanmoins associés à des effets indésirables, notamment l'apparition de mouvements involontaires (dyskinésie) et leur efficacité a tendance à diminuer dans le temps.


Les travaux publiés dans Nature Communications résultent de la convergence de deux découvertes majeurs des équipes des Pr. Hammond et Ben-Ari, qui ont respectivement montré que (1) la perte de neurones dopaminergiques compromet les signaux GABAergiques dans le striatum, et (2) les dysfonctionnements des signaux GABAergiques en conditions pathologiques sont souvent dus à une accumulation d'ions chlore qui suppriment l'action inhibitrice du GABA. D'où l'idée de faire baisser la concentration en chlore en bloquant l'importation de ces ions dans les neurones grâce à la bumétadine.


Dans cette nouvelle étude, les scientifiques ont dans un premier temps découvert que contrairement à la plupart des neurones qui libèrent typiquement un seul et unique neurotransmetteur, une sous-population de neurones du striatum libère deux messager chimiques différents: l'acétylcholine et le GABA, qui respectivement active puis inhibe l'activité neuronale pour assurer un contrôle moteur adéquat. En utilisant un modèle murin de la MP fondé sur la destruction chimique des neurones à dopamine, ils ont ensuite observé une accumulation d'ions chlore dans les neurones du striatum, qui conduit à la perte de l'inhibition GABAergique et donc à un deséquilibre en faveur d'une surexcitation de l'activité neuronale. Dans ce modèle, l'administration de bumétanide restaure l'inhibition GABAergique, normalise l'activité neuronale et améliore les capacité motrice des souris MP de manière spectaculaire.


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Score: Evaluation des capacités motrices

6-OHDA: souris MP

6-OHDA + bumetanide: souris MP traitée à la bumétadine







Figure: La bumétanide attenue les déficiences motrices de souris modèles de la MP.


"Nous avons révélé le mécanisme par lequel la bumétadine agit sur les neurones du striatum pour améliorer les capacités motrices dans la maladie de Parkinson", souligne le Pr. Yehezkel Ben-Ari, président et co-fondateur de Neurochlore et B&A Therapeutics. "Nos résultats confirment également notre hypothèse initiale : c'est bien un défaut chronique des mécanismes qui contrôlent la concentration intracellulaire d'ions chlore et donc l'excitabilité des neurones se traduisant par une déficience motrice. Nous ouvrons ainsi la voie au premier traitement contre la maladie de Parkinson qui ne soit pas fondé sur la restauration des signaux dopaminergique".


Dans cette optique, le Pr. Damier a conduit en 2016 une étude clinique pilote ouverte sur 4 patients atteints de la MP associant la bumétadine au traitement standard à base de L-Dopa (levodopa®, Teva). Les résultats ont démontré que la bumétadine réduit la sévérité des symptômes moteurs chez ces patients, en particulier les épisodes de « freezing » et les chutes. "Les traitements actuels pour les malades atteints de Parkinson reposent tous sur une même stratégie : rétablir le signal induit par la dopamine dans le cerveau. Nos études au cours des dernières années ont identifié une alternative thérapeutique, la bumétadine, qui, nous le savons maintenant, agit par un mécanisme différent", explique le Pr. Philippe Damier, Professeur de neurobiologie au Centre Hospitalo Universitaire de Nantes. "Cette molécule est utilisée depuis plusieurs décennies pour ses propriétés diurétiques dans le traitment de l'hypertension artérielle, la dysplasie bronchopulmonaire, les syndromes néphrotiques ou l'insuffisance cardiaque. Ses effets indésirables sont limités et pour la plupart gérables (diurèse, hypokalémie et deshydratation) ; la bumétadine pourrait ainsi représenter une avancée majeure et un réel gain en termes de qualité de vie pour les patients atteints par la maladie de Parkinson."


Cette convergence entre les observations sur modèles animaux et les premières données cliniques ouvrent désormais la voie à une étude clinique de phase 2 dans cette indication.

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