Un impact sur la pandémie ?

Moins il y a de virus circulant dans l’organisme d’une personne séropositive pour le VIH, moins il y a de risque qu’elle infecte une autre personne.
Cette assertion repose sur des données établies à partir d’essais cliniques et sur la base d’observations de cohortes de personnes traitées. On sait ainsi que les antirétroviraux donnés à la mère pendant la grossesse, à l’accouchement et pendant l’allaitement empêchent la transmission du VIH à l’enfant. Par ailleurs, l’observation de couples sérodifférents (l’un est infecté, l’autre pas) suggère que la personne séropositive recevant un traitement antirétroviral efficace infecte beaucoup moins son partenaire. C’est le contrôle de la charge virale, induit par les antirétroviraux, qui s’avère le facteur déterminant pour réduire, voire bloquer, la transmission du virus d’un individu à un autre. Peut-on imaginer que les antirétroviraux pourraient infléchir la courbe de l’épidémie au niveau d’un groupe, d’une population ? Si des modèles mathématiques tendent à conforter cette hypothèse, on n’en a cependant pas la démonstration scientifique sur le terrain. En particulier, on ne sait pas combien de personnes devraient être traitées dans une population et pendant combien de temps pour observer un tel effet, on ne connaît pas les conditions nécessaires au dépistage à large échelle, à une bonne adhésion au traitement etc. Un groupe d’experts français et internationaux réfléchit depuis de nombreux mois à cette question sous l’égide de l’ANRS pour tenter de trouver la meilleure approche d’intervention, tant en termes de faisabilité, d’acceptabilité, d’efficacité et dans le respect du droit des personnes.

L’ANRS a décidé de lancer une étude interventionnelle dont elle sera le promoteur. L’étude ANRS 12249-TasP - Treatment as prevention - va se dérouler dans une région rurale d’Afrique du Sud, très fortement touchée par l’épidémie (prévalence supérieure à 20%). Le dépistage du VIH y sera proposé systématiquement. Deux groupes de population seront ensuite randomisés par village : dans le premier, toutes les personnes dépistées séropositives se verront proposer une mise sous traitement immédiat quel que soit le niveau de leurs CD4 ; le second groupe recevra un traitement selon les directives nationales sud-africaines et internationales (en fonction du nombre de lymphocytes CD4). 40 000 volontaires y participeront. Toutes les personnes recevront une large gamme de moyens de prévention. Une phase pilote, financée par l’ANRS (pour 3 millions d’Euros), permettra de valider, à partir de 2011, l’acceptabilité et la faisabilité de ce programme de recherche et portera sur environ 15% de la population totale de l’étude. Si les résultats de cette phase pilote se révélaient satisfaisants, ANRS 12249- TasP pourrait se poursuivre dans le but d’évaluer l’efficacité de cette stratégie, jusqu’en 2015, sous réserve de compléments financiers internationaux.

A l’issue de l’étude, on espère pouvoir démontrer que la mise sous traitement immédiate de toute personne dépistée séropositive peut réduire de façon importante la diffusion du virus au sein du groupe dans lequel elle vit. « Après avoir démontré le bénéfice des antirétroviraux au niveau individuel, puis le rôle de ces traitements pour réduire le risque de transmission de la mère à l’enfant, on entre dans une nouvelle ère : les antirétroviraux apporteront peut-être un bénéfice préventif important à l’échelle d’une population ; si ce concept était validé, on en imagine l’importance en termes de retombées en santé publique», déclare le Pr Jean-François Delfraissy, Directeur de l’ANRS.

Cette recherche est élaborée en partenariat avec une équipe sud-africaine et avec des associations locales de lutte contre le sida. Les responsables sont le Pr François Dabis (Université de Bordeaux II, Inserm Unité 897), le Pr Marie-Louise Newell (Africa Centre for Health and Population Studies, University of KwaZulu-Natal, Somkhele, KwaZulu-Natal). Le Pr Bernard Hirschel (Hôpital cantonal de Genève) est le président du Conseil scientifique de l’étude. Des discussions avec les autorités nationales Sud-Africaines sont engagées pour définir les conditions optimales de réalisation de la recherche au plan politique et éthique.

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