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Dé-confiner le thermalisme en France : Un enjeu pour les patients et pour l'économie territoriale


Le thermalisme n'est pas du tourisme !


Interpellé sur la réouverture des stations thermales, le premier ministre a annoncé hier que « la réouverture des activités touristiques » ne sera décidée qu'à la fin du mois de Mai.

Mais la médecine thermale n'est pas une activité touristique ! C'est une médecine qui fait l'objet de nombreuses études scientifiques, notamment dans la prise en charge des troubles anxieux, avec une baisse significative de la consommation des médicaments.

Réduire la médecine thermale à une activité touristique est une erreur.

Le thermalisme s'inscrit à part entière dans le soin et l'approche sanitaire !


A l'inverse du secteur de l'hospitalisation qui a continué de fonctionner tout au long de la crise induite par le Covid-19, le secteur du thermalisme, autre modèle d'activité médicale institutionnel est, depuis le 17 Mars, interdit de fonctionnement.

Ce domaine est certes moins connu et indispensable que celui de l'hospitalisation mais il est très investi par 600 000 curistes qui séjournent, annuellement, 3 semaines, dans l'une des 90 stations thermales françaises agréées. Il rend d'immenses services pour la prise en charge de nombreux malades chroniques qui ne trouvent d'autres moyens aussi efficaces pour réduire, entre autres, leurs douleurs, leurs troubles du sommeil ou se sevrer des médicaments.

Lors de cette crise, les centres thermaux n'ont été vu, par nos ministères que comme des lieux publics, commerciaux, touristiques et non comme des lieux de soins, qui accueillent des personnes en état de souffrance.


Nombre de nos patients curistes, sont considérés à tort comme de « petits malades ». Mais il n'existe pas de « petits malades ». Il n'y a pas de petite souffrance ; chacun a le droit (petits ou grands malades) d'être soigné afin de réduire celle-ci. Il n'est pas concevable que les individus subissent une perte de chance thérapeutique, sans motif réel, si un traitement est efficace pour eux.


La cure peut-être tout à la fois un moyen d'éviter une hospitalisation, de réduire un traitement chronique, de soulager des douleurs installées, de bénéficier d'une prise en charge psychologique et éducative qui trouverait tout son intérêt dans cette période particulièrement anxiogène.

A ce titre, tous les experts s'accordent à pronostiquer une forte « épidémie » de stress post-Covid. Pour faire face à ces besoins psychiques en forte croissance, dans les prochains mois, il va falloir trouver des lieux de prise en charge avec des programmes psychologiques adaptés, sur-mesure. Des lieux de préférence non-stigmatisants.

Quoi de mieux que les centres thermaux spécialisés en santé mentale pour apporter les conditions idéales pour cumuler ces 3 objectifs : réduction symptomatique - accompagnement psychologique - déstigmatisation ?

Cette médecine est donc essentielle pour toutes ces personnes qui n'en peuvent plus de repousser l'heure où ils pourront enfin améliorer très significativement la pénibilité chronique de leur santé.

Nombre de nos curistes se sentent oubliés, non considérés et nous interrogent quotidiennement pour connaître la date de réouverture de nos thermes. Que devons-nous leur répondre ? Nous manquons désespérément de visibilité !

Le sentiment général est que le gouvernement ne s'intéresse pas à cette médecine et ces « petits patients ».

L'argument consistant en ce que, dans nos stations thermales, nous ne serions pas capables de mettre en place une organisation interne qui protégerait nos malades du risque de contamination ne tient pas. Nous sommes prêts, et travaillons avec toute l'exigence nécessaire, conseillés par nos sociétés savantes, et sommes évidemment capables d'y arriver, tout autant que les écoles et les services de transports en commun ou les surfaces de distribution alimentaire qui le gèrent très bien depuis le début du confinement.

Alors, qu'attend le gouvernement pour nous laisser soigner les patients qui ont besoin de ces soins ? Qu'attend-il pour laisser redémarrer une activité professionnelle qui avec 700 millions d'euros dépensés annuellement et indirectement par les curistes, et 11,5 millions de nuitées vendues en hébergement marchand, a d'immenses retombées locales pour des stations situées à 90 % dans des communes de moins de 10 000 habitants.

Un secteur créateur de 9 500 emplois directs (6 500 en ETP), 40 000 emplois indirects et dépendants (dont 15 000 ETP) et 56 000 emplois induits, essentiellement dans des bassins de population, par ailleurs, assez démunis. C'est toute une économie des territoires qui est en jeu.

Toute la profession s'interroge sur l'absence de réponse, sur le manque de clarté gouvernementale eu égard aux enjeux, tant en termes de soin, que d'emploi et de vie économique pour les stations et leurs territoires.


Docteur Olivier Dubois, psychiatre, directeur des thermes de Saujon (17), et membre de la Société Française de Médecine Thermale.

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