altLes résultats de l’essai ANRS 12249 TasP montrent qu’une proposition répétée de dépistage du VIH à domicile est bien acceptée par une population rurale d’Afrique du Sud fortement touchée par le virus. La mise sous traitement antirétroviral immédiate des personnes prises en charge dans le système de soins, suite à la découverte de leur séropositivité, permet de contrôler leur infection. Cependant, l’entrée dans le système de soins des personnes diagnostiquées séropositives pour le VIH n’est pas suffisamment fréquente et rapide pour qu’une telle démarche puisse réduire la transmission du VIH au niveau de la population. Les résultats de cet essai randomisé sont présentés par le Pr François Dabis (Université de Bordeaux, Inserm U1219) à la 21ème Conférence internationale sur le SIDA (AIDS 2016) à Durban (Afrique du Sud) qui se tient du 18 au 22 juillet 2016.

La mise sous trithérapie antirétrovirale dès le diagnostic de séropositivité permet-elle de diminuer la transmission du VIH dans la population et par conséquent l’acquisition de nouvelles infections (l’incidence) ? C’est une question cruciale pour lutter efficacement contre la pandémie VIH. L’essai ANRS 12249 TasP est l’un des cinq essais randomisés internationaux actuellement menés qui visent à évaluer l’efficacité de la stratégie UTT (Universal Test and Treat) dans la réduction de la transmission du VIH au sein de populations fortement touchées. Il a été conduit en Afrique du Sud dans le sous-district de Hlabisa situé au sein de la région rurale du KwaZulu-Natal, une des régions présentant l’une des plus fortes prévalences du VIH au monde et la plus élevée de toute l’Afrique du Sud (29%). Les résultats finaux de cet essai sont présentés en communication orale par le Pr François Dabis (Université de Bordeaux, Inserm U1219) à la 21ème Conférence internationale sur le SIDA (AIDS 2016) à Durban (Afrique du Sud) qui se tient du 18 au 22 juillet 2016.

Dans cet essai, 22 zones géographiques (« clusters ») d’environ chacune 1 280 personnes âgées d’au moins 16 ans ont été définies. Les clusters sont répartis de façon aléatoire en deux groupes égaux (un groupe intervention et un groupe contrôle). Au total, entre mars 2012 et avril 2016, 13 239 individus ont été inclus dans le bras intervention et 14 916 dans le bras contrôle.

L’intervention évaluée consiste tout d’abord à proposer systématiquement aux habitants, de façon répétée (tous les six mois) et à leur domicile, un dépistage rapide du VIH. Au sein du groupe intervention, les personnes identifiées comme séropositives se voient proposer une mise sous antirétroviraux (ARV) immédiate, quel que soit leur niveau de lymphocytes CD4. Dans le groupe contrôle, la mise sous traitement est conseillée selon les indications recommandées par le Ministère de la santé sud-africain (initialement CD4<350mm3 et depuis janvier 2015 CD4<500mm3). Des centres de soins mobiles ont été implantés dans chaque cluster pour faciliter l’accès aux soins des personnes dépistées séropositives. Les personnes séropositives peuvent également à tout moment utiliser les services de santé locaux.

Les résultats montrent que :

1. Le dépistage à domicile est très bien accepté puisque le statut VIH a pu être identifié au moins une fois pour 88% des personnes contactées.

2. 37,5% des personnes diagnostiquées séropositives pour le VIH se sont rendues dans un centre de soins dans les six mois qui ont suivi le dépistage. Trois mois après leur prise en charge dans une filière de soins, 91% ont commencé un traitement ARV dans le groupe intervention, et 52% dans le groupe témoin.

3. En prenant en compte toutes les sources de données disponibles (centres de soins mobiles et structures de santé fixes), les chercheurs ont estimé que seules 4 personnes séropositives sur 10 vivant dans la région avaient une charge virale indétectable. Or, l’Onusida estime que pour atteindre les objectifs qu'elle a fixés de mettre fin à l'épidémie en 2030, 7 personnes séropositives sur 10 devraient avoir une charge virale indétectable d'ici à 2020 (Objectif 90x90x90)[1].

4. Enfin, durant l’essai, 495 personnes sont devenues séropositives. L'incidence annuelle du VIH a été estimée à 2,13% (2.13 individus sur 100 infectés en un an) dans le groupe intervention et de 2,27% dans le groupe contrôle (risque relatif ajusté: 0,96 [0,83 à 1,10]), soit des résultats statistiquement non différents.

L’essai ANRS 12249 TasP est le premier parmi les cinq en cours à fournir des données sur l’effet de la stratégie UTT au niveau d’une population. Malgré d’indéniables points positifs (excellente acceptation du dépistage répété à domicile, très bonne réponse au traitement antirétroviral pour les personnes séropositives qui décident de le démarrer), force est de constater que le défi majeur est l’entrée dans le système de soins des personnes diagnostiquées séropositives. "Ce point est primordial pour l’Afrique du Sud alors que se met en place dans ce pays un programme national de «traitement pour tous» " selon Deenan Pillay et François Dabis, co-investigateurs principaux de l’essai. Des recherches innovantes sur le système de soins et les communautés doivent être menées pour atteindre les objectifs de la stratégie UTT et espérer un jour contrôler l'épidémie.

L'essai ANRS 12249 TasP est coordonné par le Pr François Dabis, le Pr Marie-Louise Newell (Université de Southampton, Royaume Uni) et le Pr Deenan Pillay (Directeur de l’Africa Centre for Health and Population Studies, Somkhele, Afrique du Sud et University College London, Royaume-Uni). L’essai est mené en partenariat avec le Ministère de la Santé du KwaZulu Natal, Afrique du sud. Le soutien financier a été apporté par l’ANRS (France REcherche Nord&sud Sida-hiv Hépatites), la GTZ (société allemande pour la coopération internationale), la Fondation Bill et Melinda Gates, via l’International Initiative for Impact Evaluation (3ie), et la Wellcome Trust (Royaume-Uni). L’essai a été réalisé avec le soutien de Merck & Co. Inc et Gilead Sciences qui a fourni l'approvisionnement en médicaments Atripla®.

L’ANRS (France REcherche Nord&sud Sida-hiv Hépatites) a été créée en 1988. Elle mobilise les chercheurs du Nord et du Sud, de toutes les disciplines, et quelles que soient leurs appartenances, autour de questions scientifiques sur le VIH/sida ou sur les hépatites virales. L’ANRS finance les projets de recherche après qu’ils aient été évalués par des comités d’experts internationaux. Elle accompagne les projets de leur conception à leur réalisation et valorise leurs résultats afin qu’ils soient utiles aux populations. Son budget annuel d’environ 45 millions d’euros, lui est attribué par les ministères en charge de la Recherche et de la Santé. Depuis 2012, elle est une agence autonome de l’Inserm.

Abstract

The impact of universal test and treat on HIV incidence in a rural South African population. ANRS 12249 TasP trial, 2012-2016

C. Iwuji1,2, J. Orne-Gliemann3, E. Balestre3, J. Larmarange4, R. Thiebaut3, F. Tanser1,5, N. Okesola1, T. Makowa1, J. Dreyer1, K. Herbst1, N. Mc Grath1,2,6, T. Barnighausen1,7, S. Boyer8,9, T. De Oliveira1, C. Rekacewicz10, B. Bazin10, M.-L. Newell11, D. Pillay1,12, F. Dabis3, for the ANRS 12249 TasP Study Group

1Africa Centre for Population Studies, Somkhele, South Africa, 2University College London, Research Department of Infection and Population Health, London, United Kingdom, 3Universite de Bordeaux, INSERM U1219 Bordeaux Population Health, Bordeaux, France, 4IRD, Centre Population & Développement (UMR 196 Paris Descartes IRD), Paris, France, 5University of KwaZulu-Natal, School of Nursing and Public Health, Durban, South Africa, 6University of Southampton, Faculty of Medicine and Faculty of Human, Social and Mathematical Sciences, Southampton, United Kingdom, 7Harvard University, Department of Global Health & Population, Harvard School of Public Health, Boston, United States, 8INSERM, UMR912 (SESSTIM), Marseille, France, 9Université Aix Marseille, UMR S_912, IRD, Marseille, France, 10Agence Nationale de Recherches sur le Sida et les hépatites virales, Paris, France, 11University of Southampton, Faculty of Medicine and Global Health Research Institute, Southampton, United Kingdom, 12University College London, Faculty of Medical Sciences, London, United Kingdom

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